Encore environ seize (16) mois et le président béninois Patrice Talon finira son second et dernier mandat constitutionnel. Mais à mesure que les mois s’égrènent et nous rapprochent de 2026, la polémique et l’inquiétude gagnent le rang des hommes politiques aussi bien de la mouvance présidentielle que de l’opposition et par ricochet tout le peuple béninois. Et pour cause. Patrice Talon va-t-il vraiment partir du pouvoir au terme de ses deux mandats constitutionnels comme se fut le cas de ses prédécesseurs, le feu Général Mathieu Kérékou et son successeur Boni Yayi ? Cette question est loin d’être évacuée comme le font croire certains griots de Patrice Talon autant que lui-même. Patrice Talon claironne qu’il partira en 2026, seulement que certains de ses actes contredisent à suffisance cette volonté que l’homme affiche devant les caméras. Les exemples foisonnent aujourd’hui et apportent de l’eau au moulin de ses adversaires. Mieux, pour nombre d’observateurs le pessimisme est de mise simplement parce que Patrice Talon ne respecte pas ses paroles et engagements.
Des actes très peu rassurants
A mesure que l’on s’approche de 2026, Patrice Talon devient de plus en plus hargneux d’abord vis-à-vis de ses courtisans et de toute voix discordante, muselant du coup la classe politique qui est obligée de s’aligner sur la volonté de l’homme fort du moment qui n’a pour seul objectif d’empêcher la compétition.
Des arrestations et limogeages
Patrice Talon clame sa bonne foi de partir du pouvoir en mai 2026. Seulement que l’homme durcit le ton envers ses partenaires et collaborateurs qui s’offrent la liberté d’afficher leurs ambitions de briguer la magistrature suprême en 2026. L’acte 1 de ce durcissement de ton, le départ inattendu du gouvernement de Oswald Homéky pour avoir doigter Olivier Boko comme meilleur dauphin de Patrice Talon. Il est clairement reproché au jeune ministre des Sports de vouloir saboter la réforme du système partisan. L’acte 2 de cette position radicale sera le limogeage de Johannes Dagnon, le conseiller spécial et cousin de Patrice Talon, pour des raisons relatives à la présidentielle de 2026 selon dame rumeur. En acte 3, Patrice Talon à mots à peine voilés, s’oppose à toute idée de candidature de son ami et partenaire politique Olivier Boko que les rupturiens appellent vice-président, faisant ainsi de lui, le numéro 2 de la rupture. Ces signes avant-coureurs ne rassurent guère le commun des Béninois qui redoutent désormais la bonne foi de Patrice Talon, malgré ses nombreuses déclarations qui parfois se contredisent sur la question. Malgré les jeux de mots, malgré la rhétorique du porte-parole du Gouvernement, le pessimisme reste visible et têtu. Même si d’autres actualités par moment, venaient éclipser ce sujet d’intérêt national.
Les actes d’incertitudes s’enchainent. Patrice Talon va franchir une nouvelle étape. Un scénario fortuit. L’arrestation de Olivier Boko et de Oswald Homéky en septembre 2024, sous le fallacieux soupçon de coup d’Etat . Aux yeux de certains, il s’agit d’un jeu entre amis afin de donner pour victime Olivier Boko, toute situation qui lui ouvrirait les portes de la Marina au terme du scrutin de 2026. Mais pour des personnes les plus averties, il s’agit là de l’explosion de la brouille entre les deux hommes que dame rumeur véhiculait depuis que des mouvements au nom de Olivier Boko ont commencé par voir le jour.
En effet, selon les bruits des couloirs et des spéculations, les ambitions de Oliviers Boko ont tôt fait de mettre un coup de froid entre lui et son ami, le président Patrice Talon. Mais les communicants de la Marina prenaient pour oiseau de mauvais augure tous ceux qui osaient en parler à visage découvert. Aujourd’hui, à qui l’histoire donne raison ?
Droit dans ses bottes et déterminé à maintenir la classe politique sous son joug, Patrice Talon va assener un coup de massue à son ministre des Mines. Samou Adambi est limogé dans les tout premiers jours de l’année 2025, et suspendu dans la foulée de la formation politique dont il assure la vice-présidence. Car quelques semaines plutôt, une série de publications le présentaient comme le porte-étendard du Bloc républicain au prochain scrutin présidentiel. On lui reproche donc son ambition de vouloir porter les couleurs de son parti politique à la prochaine présidentielle, au nom d’une réforme du système partisan.
Les appels au 3ème mandat
Pendant que de potentiels candidats à la candidature au dauphinat sont traqués et sanctionnés avec fermeté, le tapis rouge est dressé pour des griots qui appellent Patrice Talon à continuer son aventure à la tête du Bénin en dépit de la constitution. Plus on s’approche de 2026, plus la liste de ces courtisans véreux s’allonge. De Jacques Migan à la vice-présidente de la République Mariam Chabi Talata, cette liste s’ouvre à Bertin Coovi, Coffi Aza (à qui le fâ aurait révélé que Patrice Talon ne doit pas quitter le pouvoir au terme de son second et dernier mandat), aux pseudo juristes qui se donnent pour mission l’interprétation de la constitution sans oublier les klébés chargés de relayer ces idioties d’une époque révolue.
Ces individus appellent le chef de l’Etat à violer la Constitution, mais ce dernier n’a jamais sanctionné qui que ce soit ou tout au moins rappeler à l’ordre ses partisans qui se livrent à ce jeu qui n’est rien d’autre que le trouble à l’ordre public. Au contraire, le porte-parole du gouvernement trouve « flatteur » de tels appels. Face à la presse il y a quelques jours, Wilfried Léandre Houngbédji, au mépris de la loi fondamentale, s’extasiait de ces élucubrations des gens en panne d’inspirations.
A la lumière de tout ceci, seuls les idiots de la République croiront aux déclarations de Patrice Talon et ses communicants. « Patrice Talon n’a jamais respecté ses engagements politiques. Moi je reste sceptique quant à son départ du pouvoir en 2026. Car l’homme pose des actes qui sont aux antipodes de ses déclarations », nous confiait un observateur de la politique béninoise qui a requis l’anonymat.
Au-delà de sa position vis-à-vis de ses partisans, Patrice Talon utilise de plus en plus la force publique pour interdire des manifestations politiques, syndicales voire associatives même jusqu’aux lieux privés. La police républicaine est déployée pour disperser et passer à tabac les manifestants. Que cache alors tout ceci si tant est que Patrice Talon veut vraiment passer le témoin en 2026 ? Un autre observateur répond à notre interrogation en ces termes « Patrice Talon veux instaurer la peur soit pour se maintenir au pouvoir, soit pour imposer un homme de main au-delà de 2026. D’ailleurs, lors de son discours sur l’état de la Nation le 20 décembre 2024, il a déjà donné le ton, toute situation qui suscite des inquiétudes ».
Vincent Fortuné ASSOGBA