Le 20 décembre 2024, le président Patrice Talon du Bénin a sacrifié à une exigence constitutionnelle en allant prononcer son discours sur l’état de la Nation devant la représentation nationale. Si nombre de Béninois n’entendaient rien de nouveau que des phrases alignées pour plaire à soit et recueillir des applaudissements de ses partisans sans contenus, grande a été la surprise des observateurs de la vie politique béninoise. Patrice Talon se complaisant dans l’autosatisfaction s’est fait passer pour celui par qui le Bénin est désormais un pays prospère qui compte au concert des nations. A cet effet, il a parlé d’un passé honteux du pays pourtant jadis connu et respecté pour ses valeurs démocratiques. Patrice Talon et sa mouvance tentent sans succès la réécriture l’histoire du Bénin.
L’autosuffisance et le mépris
Patrice Talon fait semblant d’oublier qu’il a été élu en 2016 à l’issue d’une élection transparente, libre, inclusive et démocratique organisée par son prédécesseur. Le Bénin avant 2016 était cité en exemple pour sa démocratie et ses élections sans heurts. Que le chef de la rupture se regarde dans la glace et quitter cette zone de confort où il se retranche parlant du passé honteux d’un état de droit à lui légué en 2016 et devenu aujourd’hui un état de lois, donc état policier.
Mieux, Patrice Talon parle d’un passé honteux qui pourtant lui a tout donné. C’est dans ce passé honteux qu’il a grandi et fait fortune avec comme seul client l’Etat béninois. Quel mépris !
Comment peut-on être si fier de sa gouvernance quand les statistiques montrent clairement que le taux de pauvreté monte à grande échelle ? comment peut-être si fier quand des milliers de Béninois sont injustement en prison et d’autres milliers en exil ? comment peut-on être si satisfait alors qu’à chaque élection depuis 2019, la police et l’armée tirent à balles réelles sur les populations qui réclament l’exercice de leurs droits civiques ? Comment peut-on être si fier alors que des voix s’élèvent (société civile, religieux, syndicalistes, opposition, personnalités politiques…), pour demander la relecture du code électoral qui porte en lui des germes d’une crise post-électoral ?
Affichant une telle fierté alors que tout va mal, Patrice Talon exprime son mépris pour le peuple. Le chef de l’Etat regarde ses administrés de haut avec de l’orgueil et le dédain. Très agressif, J’ai vu un Patrice Talon dans une posture de « je suis le plus intelligent et le seul capable de bâtir le Bénin ». J’ai vu un Patrice Talon très suffisant et va-t’en-guerre qui ne laisse aucune place pour le dialogue et tout ceci sous les applaudissements hypocrites d’un Parlement aux ordres. Des partisans sans contenu qui n’ont d’autre choix que d’ovationner le prince, alors même le peuple accablé de taxes et opprimé manque le minimum. Le parlement devenu une caisse de résonnance, un prolongement de l’exécutif, cautionne les conditions misérables imposées aux producteurs du soja et de cajou sous le pseudo « industrialisation ». Ainsi va le Bénin de Patrice Talon.