Dès sa prise de fonction en 2016, Patrice Talon a fait une déclaration qui a fait réagir l’élite béninoise. En visite en France, face au Président François Hollande, il déclare « Le Bénin est comme un désert de compétence… ». Sollicitant ainsi des compétences françaises pour l’accompagner. Que ne fut l’indignation des béninois libres et compétents? Sauf ses partisans ( avocats de renommée, professeurs d’universités, juristes de haut niveau…) ont applaudi une si humiliante déclaration.
Pour mettre en œuvre cette option suicidaire, Patrice Talon va faire voter par un parlement acquis à sa cause, une loi relative aux collaborateurs extérieurs. Le boulevard lui est alors ouvert. Ainsi, plusieurs expatriés vont déposer leurs valises au Bénin, sur la demande du locataire de la Marina, qui a un faible pour ce qui vient de loin. Le Port autonome de Cotonou, la Sbee, la direction des douanes et droits indirects, la Caa, des ambassades, l’Anip et bien d’autres structures verront à leur tête des expatriés qui ne maîtrisent rien des réalités du Bénin et même le secteur pour lequel, certains sont sollicités. Ces derniers sont rémunérés à prix d’or sur le dos du contribuable béninois.
C’est alors que le Port autonome de Cotonou, désormais aux mains des belges, va connaître le débarquement d’une horde d’expatriés à la tête de l’administration. Avec l’arrivée de Christiaan de Block et son équipe, les cadres béninois seront relégués aux seconds rôles. Le nouveau directeur général est appelé au chevet du port de Cotonou qui pourtant se portait finalement bien ( Boni Yayi ayant réussi à lui insuffler de l’oxygène avec l’investissement du Mca. Au bout de quelques mois, de Block sera limogé (pour quelle raison ?). Une suffisance de résultats ? Malversations financières ? Le gouvernement n’a donné aucune explication aux béninois dont les impôts servent à payer chèrement les expatriés. Cédant son fauteuil à un autre compatriote à lui, Joris Albert Thys, Christiaan de Block saute dans le premier avion et regagne son pays. Pas de compte à rendre aux pauvres Béninois. Joris Albert Thys va aussi rendre son tablier en décembre 2023. Il quitte le pays sans crier gare. Mais, Patrice Talon ne s’en offusque guère. Le 20 décembre 2023 en Conseil des ministres, il nomme un troisième Dg en l’espace de 5 ans. Bart Van Eenoo s’installe et rémunéré à coup de plusieurs millions de francs Cfa par mois.
La Sbee, la vache à traire ?
Tout comme le Port autonome de Cotonou, la Société béninoise d’énergie électrique (Sbee), sera livrée aux expatriés. Mais ici, ce sera des gens venus de l’autre coté de l’Atlantique. Des canadiens venus pour « développer le Bénin » dira en 2019, le tout nouveau Dg de la Sbee, Jacques Paradis. Comme son nom l’indique, les béninois rêvaient vraiment d’un paradis énergétique. De quoi espérer donc. Que d’annonces faites et abondamment relayées par les médias du système et des milliers de web activistes commis à cet effet. Mais au fil du temps, le paradis annoncé aux béninois se révèle être une farce. Jacques Paradis a ouvert grandement la porte de l’enfer énergétique pour les béninois. Le délestage (que l’autre a tenté en vain d’appeler coupure du courant) s’installe. Paradis a manqué de réactivité. C’est alors que son limogeage s’en suit. Paradis part alors avec son cortège de « malheur » et Gerard Zadgrodnik prend le relais. Quelques mois plus tard, une odeur de puanteur sort de la maison Sbee. Les caisses de la Sbee font l’objet d’un siphonnage alors que les béninois souffraient le martyr en matière d’énergie électrique. L’affaire s’éclate en début d’année 2023. Des perquisitions ont été faites par la police. Des billets de banque évalués à des centaines de millions ont été retrouvés dans le domicile des responsables concernés dont le Dg Gérard Zadgrodnik. Des béninois sont arrêtés et jetés en prison. Le Dg n’est pas inquiété quand bien même il est plongé lui aussi. Les enquêtes étaient encore en cours lorsque début juillet 2023, Zadgrodnik s’offre un congé hors du pays. Il prend soin de nommer un intérimaire. Sa façon de faire ses adieux au Bénin. En son temps nous avions dénoncé ce fait. C’est une manière de narguer notre justice. Comme nous l’avions annoncé, Zadgrodnik a fuit ainsi le Bénin car, il ne reviendra plus des congés qu’il s’est permis alors que la société traversait une crise de détournement de deniers publics. Et tout ceci avec la bénédiction sans nul doute de Patrice Talon, leur tuteur. Malgré le flou artistique qui entoure le départ non justifié de Zadgrodnik, le 20 décembre 2023, un autre expatrié sera nommé au même poste. André-Marie Kaczmarek est nommé en remplacement de Zadgrodnik parti sans traces. Que de manque à gagner pour le Bénin, qui peine à s’offrir l’autonomie énergétique.
Anip, Pascal Nyamulinda et la tourmente de malversations
En début de semaine, comme une traînée de poudre la nouvelle de la démission du directeur général de l’Agence nationale d’identification des personnes (Anip), a été répandue sur les réseaux sociaux. Le rwandais, Pascal Nyamulinda a déposé sa démission et un nouveau Dg est nommé dans la foulée, alors même qu’une affaire de malversations s’est éclatée dans la structure avec l’arrestation de près d’une vingtaine d’agents. Le Dg a démissionné selon ce que la rupture a bien voulu servir aux béninois. Qu’à cela ne tienne. Maintenant qu’il a démissionné, va-t-il se mettre à la disposition de la justice pour la manifestation de la vérité ou va-t-il regagner aussi tranquillement son pays ? Bien malin qui donnera la vraie réponse.
Voilà dans quoi Patrice Talon à plonger les ressources du Bénin depuis 2016. Sa « folie » pour des expatriés crée de graves préjudices pour l’économie béninoise, mais Patrice Talon ne s’en n’aperçoit pas. Nous reviendrons sur d’autres dossiers de malversations restés sans suite.
F. A.